Palais Brongniart, Paris.
2017
« L’Épreuve du temps » photographies de Nikos Aliagas sur les grilles du Palais Brongniart. Commissaire de l’exposition, Patricia Houg avec GL Events du 16 janvier au 16 mars 2017.
On ne présente plus Nikos Aliagas pourtant tout porte à croire que l’homme qui a présenté son exposition, « l’Épreuve du temps », sur les grilles du Palais Brongniart, est bien plus qu’une icône télévisuelle de la petite lucarne. Le présentateur de The Voice y présente des clichés d’anonymes en noir et blanc, pris ces dernières années, au hasard de ses rencontres et de ses voyages. Pour comprendre qui est Nikos Aliagas il faut observer ses photos, à travers le regard de ses sujets photographiés, c’est là que l’on devine la personnalité du photographe dans un jeu de miroir qui fait la part belle à l’humanité. Dans la grande salle de la Corbeille, des clichés géants en noir et blanc du photographe, un avant-goût de ces images exposées pendant un mois sur les grilles extérieures du Palais Brongniart, des anonymes au regards qui transpercent : « Je recherche à travers l’autre le chemin qui me rappelle d’où je viens » nous dit Nikos Aliagas qui semble ne pas avoir oublié son héritage familial « j’ai passé mon enfance a observé les mains des travailleurs de la terre, mes grands-parents grecs étaient agriculteurs, leur vie était modeste mais la richesse de leur enseignement sur les choses de la vie a été déterminante dans mes choix d’adulte ». Aliagas ne cesse de rechercher les marques du temps à travers ses clichés « Nous vivons une période étrange où les images pullulent de partout mais elles nous donnent le sentiment qu’elles fuient, qu’elles n’impriment pas, que chaque image remplace l’autre de façon presque cynique, or c’est la temporalité qui crée la beauté d’une image, les visages qui assument les traces du temps nous en disent plus sur notre propre existence que la plupart des guides de bien-être du 21e siècle ». Philosophe l’homme des médias ? Probablement une histoire d’ADN, les Grecs depuis la nuit des temps sont les amis de la sagesse. Cependant ses images ne laissent pas indifférent, elles touchent au plus profond et nous poussent à une réflexion sur le passage de l’existence « Je ne suis pas dupe du caractère éphémère de la télévision, dit-il mais cette attirance pour la photographie est bien antérieure à mon parcours professionnel, je prenais déjà des photos imaginaires, enfant sur le chemin de l’école, que je rembobinais dans mon esprit tous les soirs avant de m’endormir. Je ne voulais pas oublier ce que je voyais car j’ai ressenti très vite que rien ne durait vraiment, je voulais sauver les images de mon quotidien du néant. » La fameuse peur du vide et de la mort commune aux photographes, Henri Cartier-Bresson a dit un jour que « la photographie est une impulsion qui vient d’un regard permanent qui saisit l’instant de son éternité ». Et il y a de l’éternité dans les images de Nikos Aliagas, quelque chose de suspendu et un semblant de mélancolie aussi « Je ressens plus de la nostalgie que de la mélancolie, précise-t-il toutefois, un sentiment de déracinement sur les choses qui nous entourent, ça vient peut-être de mes ancêtres voyageurs qui ont dû survivre à bien des épreuves, j’ai toujours le sentiment d’être de passage ». Les mains photographiées par l’artiste nous parlent, elles disent « ce que le masque social ne dit pas », elles disent l’universalité de l’être humain, elles disent l’épreuve de l’existence et nous relient finalement à l’épreuve du temps à laquelle nous sommes tous assujettis.
Gilles de Cahors